Par Hélène Roulot-Ganzmann
Si François Bellefeuille (médecine vétérinaire 1999 et 2000) fait aujourd’hui partie des comiques qui comptent au Québec, l’humour n’est pas pour autant sa première carrière. L’ex-médecin vétérinaire avoue d’ailleurs spontanément que ses cinq années passées sur le campus de l’Université de Montréal à Saint-Hyacinthe sont parmi les plus belles de sa vie. Et que c’est là, qui plus est, qu’il a débuté le stand-up…
« On avait l’habitude de socialiser dans un petit café étudiant au cœur du campus, se souvient-il. On y organisait tous nos partys et puis une fois par session, il y avait ce qu’on appelait le café-show. Tous ceux qui le souhaitaient pouvaient faire une prestation : guitare, théâtre, claquettes… Moi, j’y ai fait mes premiers sketchs. »
Sa voie est cependant toute tracée. Il aime les sciences, il aime les animaux, il aime l’ambiance sur le campus et s’est fait beaucoup d’amis dans sa cohorte. Il fera ses quatre années pour obtenir son doctorat, poursuivra avec une année d’internat à la clinique des petits animaux et embrassera la carrière de vétérinaire. « J’ai toujours aimé faire rire, mais au moment de choisir mes études, la piqûre n’était pas assez forte, croit-il. Et puis, ça m’a rattrapé. Un matin, j’étais dans ma voiture et j’ai entendu la directrice de l’École nationale de l’humour, Louise Richer, à la radio. C’était le moment des inscriptions. J’ai eu un flash. J’ai passé les auditions. »
François Bellefeuille obtient son ticket d’entrée et ressort diplômé deux ans plus tard. On est en 2007. Il lâche petit à petit une carrière et un métier qui l’avaient défini durant une dizaine d’années et grâce auxquels il vivait aisément, pour la vie d’artiste et la peur du lendemain. « Quitter la médecine vétérinaire, ça a été un deuil, confie-t-il. J’avais rêvé de ce métier, j’y avais fait ma place, et je devenais un humoriste même pas connu. C’était difficile à expliquer comme mouvement. J’avais le syndrome de l’imposteur. Et puis, quand ça a commencé à fonctionner pour moi, les gens ont trouvé mon parcours très courageux. »
Il commence par les toutes petites salles, s’inscrit à des concours, participe plusieurs années de suite à En route vers mon premier Gala Juste pour rire. Il publie des vidéos humoristiques sur le web, fait ses premiers passages à la télévision. En 2010, François Bellefeuille est révélation Juste pour rire. En 2012, il obtient l’Olivier de la découverte de l’année, puis le prix Victor – artiste de l’année en 2014. Il parcourt alors toutes les routes du Québec avec son premier one-man-show, dont il vendra plus de 300 000 billets. Depuis un an, il est de retour avec un deuxième spectacle, intitulé Le plus fort au monde. « Sur scène, j’incarne le côté fou de ma personnalité, souligne-t-il. Mais mon côté scientifique n’est jamais très loin lorsque j’écris. J’analyse la structure de tous mes numéros avec un regard scientifique. Et puis, en humour, il y a une obligation de résultat. Tu dois faire rire. C’est finalement très mathématique comme logique. » Ce deuxième spectacle, il est allé le roder au Bordel Comédie club, une salle intimiste qu’il a ouverte en 2015 à Montréal avec d’autres humoristes parmi lesquels on trouve Louis-José Houde, Mike Ward, Martin Petit ou encore Laurent Paquin. Un cabaret dont il est très fier et qui l’aide, dit-il, à être un meilleur humoriste. Et puis, devant la centaine de spectateurs qu’elle contient, il fait comme un bond de vingt ans en arrière, à l’époque de ses premières armes devant le public du campus de Saint-Hyacinthe… En quelques mots… Une ville : Montréal, parce qu’elle est très créative et en même temps moins flamboyante que d’autres métropoles. C’est en s’y promenant qu’on apprend à la connaître. Un livre : Sapiens : une brève histoire de l’humanité de Yuval Noah Harari, pour les connaissances mais aussi parce qu’il m’a permis de mieux comprendre l’humain et c’est très important en humour. Une chanson : le Bon gars de Richard Desjardins, parce que moi non plus, je n’arrive pas à vivre dans la mesure. Un prof de l’UdeM : Norbert Bonneau, professeur de chirurgie orthopédique à l’École vétérinaire. Il est aujourd’hui à la retraite, mais à mon époque, personne ne loupait un de ses cours. Ils étaient à la fois intéressants et drôles. Ses numéros étaient bien rodés! Une qualité : l’ambition. Lorsqu’elle est saine, elle propulse vers l’avant. Une personnalité publique : François Bellefeuille! Crédit photo : Mari Photographe